L’administration Plante réagit à l’implantation d’un poste d’Hydro devant la BAnQ

Ce n’est pas la Ville qui a aiguillé Hydro sur les terrains de la BAnQ, affirme le responsable de l’urbanisme.
Photo: Jean-François Nadeau Le Devoir Ce n’est pas la Ville qui a aiguillé Hydro sur les terrains de la BAnQ, affirme le responsable de l’urbanisme.

En réaction à une pétition de grands noms de la culture québécoise qui s’opposent en bloc à la construction d’un immense poste électrique de 315 000 volts sur les terrains verts de la Grande Bibliothèque, l’administration de la Ville de Montréal insiste pour dire qu’elle n’était pas en mesure de forcer Hydro-Québec à s’installer ailleurs.

« On nous avait dit qu’Hydro-Québec cherchait un terrain », résume Robert Beaudry, responsable de l’urbanisme à la Ville de Montréal. « Quand Hydro est venue nous voir pour s’installer sur l’îlot Voyageur, nous leur avons dit non », explique-t-il. L’espace de l’ancienne gare d’autocars, abandonnée depuis plus de quinze ans, la Ville l’envisageait pour y construire des tours de logements. « C’était, pour nous, un terrain réservé pour du logement. D’ailleurs, on vient d’annoncer le projet. »

L’élu montréalais, responsable du dossier, remet cependant en question l’interprétation des événements faite par Bibliothèque et Archives nationales du Québec (BAnQ). L’institution culturelle a indiqué au Devoir que c’est « à la suggestion de la Ville de Montréal » qu’Hydro a « approché BAnQ en janvier 2019 pour nous informer que le terrain de BAnQ était considéré comme l’une des options possibles ».

Selon Robert Beaudry, il s’agit d’une interprétation « discutable ». « On n’a pas le pouvoir, comme Ville, de contraindre une société d’État à aller à un endroit ou un autre. »

Pourtant, dans une lettre adressée à la mairesse Valérie Plante elle-même, le président-directeur général d’Hydro-Québec, Michael Sabia, rejoint l’interprétation de BAnQ. Dans cette lettre, datée du 19 avril 2024, le grand patron d’Hydro-Québec affirme que, l’option de l’îlot Voyageur étant écartée « en raison d’un projet immobilier, il a été convenu avec la Ville d’analyser d’autres sites, dont le terrain au nord de la Grande Bibliothèque ». Une option coulée dans le béton, selon ce qu’affirme depuis Hydro-Québec.

Pour Robert Beaudry, cette lettre confirme plutôt que la Ville de Montréal a obtenu une voix dans les discussions concernant ce projet.

Pourquoi la Ville de Montréal a-t-elle tout de suite cédé des droits de servitudes pour la réalisation de ce projet ? Pour l’élu du district Saint-Jacques, l’administration montréalaise n’avait tout simplement pas de rapport de force face à la société d’État. « On est devant une société d’État et un gouvernement qui disent que c’est une nécessité. La Ville n’a pas les moyens de s’opposer. C’est avec ce petit levier des servitudes, si on veut, que nous avons obtenu la garantie qu’Hydro organise au moins un concours architectural et nous présente quelque chose qui soit le plus acceptable possible. »

M. Beaudry n’a pas d’exemple d’une autre grande ville où un poste électrique semblable serait installé devant un carrefour de transports ou encore à côté des archives nationales. « On va voir ce qu’ils vont nous proposer. »

La réponse des citoyens

« Notre souhait est que ça se fasse avec une démarche citoyenne », répète Robert Beaudry. Devant la levée de boucliers de plusieurs sommités de la société québécoise qui dénoncent ce projet, la Ville sent-elle que l’« acceptabilité sociale », un concept répété dans les différents états de ce dossier, n’est pas au rendez-vous ? « J’ai parlé de démarche citoyenne, c’est-à-dire de la façon d’être à l’écoute pour rendre le projet le plus acceptable possible. On est au début du processus. »

Le responsable de l’urbanisme au sein de l’administration Plante ne cache pas être sensible aux dénonciations répétées du projet. « On est préoccupés. Mais au moins, avec cette lettre d’Hydro-Québec, nous avons obtenu la garantie que des efforts seraient faits pour minimaliser l’empreinte au sol de ce bâtiment. Mais non, on n’acceptera pas n’importe quoi. Le projet doit se faire de façon architecturale. Si on avait eu l’opportunité de répondre à d’autres projets, on l’aurait fait. Encore une fois, on ne peut qu’accompagner ce projet. »

La Ville n’a-t-elle pas le sentiment que ce secteur, déjà malmené à la suite de la construction d’une tranchée routière à proximité sous l’ère du maire Jean Drapeau, risque de dépérir encore davantage ? Robert Beaudry reconnaît qu’il y a eu des « horreurs et des erreurs ». Est-ce le cas, cette fois encore, avec ce projet d’Hydro-Québec planté sur les terrains de la Grande Bibliothèque ? « Les besoins d’espaces verts dans le quartier sont importants. Nous souhaitons que le projet se fasse le mieux possible. Ils sont au début de la consultation. Mon rôle, ce n’est pas de “cheerleader” ce projet, mais d’être assis à la table avec les autres partenaires et de faire en sorte que ce soit le plus acceptable possible. »

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