Étudiants et partis d’opposition dénoncent la fin hâtive des bourses Perspective

Le député solidaire Sol Zanetti a vivement critiqué vendredi la fin devancée des bourses Perspectives.
Photo: Jacques Boissinot La Presse canadienne Le député solidaire Sol Zanetti a vivement critiqué vendredi la fin devancée des bourses Perspectives.

Des partis d’opposition, des associations étudiantes et plusieurs organisations dénoncent la fin devancée du programme des bourses Perspective Québec. Cette décision risque de précariser la situation financière de milliers de personnes qui aspirent à occuper des postes en forte demande dans la province, notamment dans les secteurs de la santé et de l’éducation, préviennent-ils.

Ce programme permet depuis l’automne 2022 aux étudiants qui en bénéficient de recevoir, pour chaque session à temps plein terminée avec succès, une bourse de 1500 $ (au cégep) ou de 2500 $ (à l’université). Les nouvelles inscriptions devaient cesser d’être prises à partir de l’automne prochain, mais Québec a décidé de devancer cette date butoir à la session d’hiver en cours, afin d’économiser plus de 100 millions de dollars sur cinq ans, révélait Le Devoir jeudi.

La ministre de l’Enseignement supérieur, Pascale Déry, a justifié cette décision par les résultats mitigés qu’ont obtenus ces bourses au nombre d’inscriptions à divers programmes d’études liés à des emplois en forte demande dans la province, de même que par la situation financière de l’État, qui accuse un déficit de 11 milliards.

Or, « malgré ses écueils, la bourse Perspective constitue pour certains étudiants la seule aide financière leur étant consentie », a réagi sur les réseaux sociaux la députée libérale Madwa-Nika Cadet. « Vu la précarité de nos jeunes, offrons-leur une solution éprouvée : rémunérons les stages dans le secteur public », a-t-elle ajouté, reprenant ainsi une demande maintes fois répétée dans les dernières années par diverses associations étudiantes.

« La CAQ commet une erreur monumentale en mettant fin sans nuance aux bourses Perspective. En ce moment, les étudiants et les étudiantes du Québec font face à la plus grosse hausse de loyer de leur vie et doivent parfois cumuler deux emplois pour payer leurs factures », a pour sa part réagi l’élu solidaire Sol Zanetti dans une déclaration écrite. « Toute mesure qui augmente l’endettement étudiant en pleine crise du coût de la vie est totalement déconnectée de la réalité », a-t-il ajouté.

Le député péquiste Pascal Bérubé a quant à lui qualifié de « coupe massive » faite « sans préavis » cette décision du gouvernement qui risque d’affecter « très négativement la motivation des étudiants à entreprendre des études dans des milieux où la demande de main-d’œuvre est très forte ».

Des formations à valoriser

En entrevue au Devoir jeudi, la ministre Déry a assuré que les milliers d’étudiants déjà en cours de formation dans les programmes admissibles pourront continuer de recevoir cette bourse jusqu’à la fin de leurs études. Certaines bourses pour étudiants stagiaires qui existaient avant la mise en place du programme Perspective Québec seront d’ailleurs de retour dès l’automne afin de limiter les conséquences négatives de la fin de l’initiative. Elles seront accessibles aux étudiants de certains programmes en santé, en services sociaux, en éducation et en éducation à l’enfance.

« Je suis consciente que ce n’est pas une décision facile, mais nous avons au Québec le modèle d’accessibilité aux études le plus généreux en Amérique du Nord et on va continuer de soutenir nos étudiants dans leurs parcours d’études », a affirmé la ministre Déry sur les réseaux sociaux vendredi.

La Fédération des cégeps a quant à elle prévenu que la fin prématurée de ce programme « risque de freiner l’accès à l’enseignement supérieur pour de nombreux étudiants et étudiantes, d’accroître la précarité étudiante et de compromettre la formation d’une relève essentielle dans des secteurs en pénurie de main-d’œuvre ». L’organisation fait d’ailleurs état d’une croissance globale de 5 % des inscriptions aux programmes collégiaux visés par cette bourse entre 2022 et 2024. Celle-ci a toutefois été beaucoup plus forte en génie (+ 20 %), par exemple, que dans les programmes d’éducation à la petite enfance (+ 2 %).

« Le gouvernement avait fait de ces bourses un levier stratégique, et les inscriptions progressaient. Plutôt que de reculer, il faut continuer d’investir pour soutenir la population étudiante et assurer une relève qualifiée dans les domaines névralgiques pour l’avenir du Québec », martèle la présidente-directrice générale de la Fédération des cégeps, Marie Montpetit.

L’Union étudiante du Québec (UEQ) et la Fédération étudiante collégiale du Québec (FECQ) ont pour leur part déploré fermement, dans un communiqué commun, la décision du gouvernement de jeter « aux ordures » ce programme, dans lequel il a injecté 538,2 millions de dollars depuis sa mise en œuvre.

« Ce sont les personnes étudiantes de plus d’une centaine de programmes collégiaux et universitaires qui assumeront les frais de cette nouvelle politique d’austérité du gouvernement caquiste », déplorent les deux organisations, selon qui cette décision aura un impact important sur la situation financière de milliers d’étudiants devant effectuer des stages non rémunérés dans les secteurs publics, notamment en santé et en éducation.

« Bien que la ministre [Pascale Déry] ait exprimé à plusieurs reprises son désir que ces personnes stagiaires soient rémunérées, l’UEQ et la FECQ voient désormais ses véritables intentions, après qu’elle a coupé dans ce programme qui allégeait leur fardeau financier », peut-on lire.

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