Les aliments asiatiques plus populaires que jamais
Collaboration spéciale

Ce texte fait partie du cahier spécial Plaisirs
Longtemps cantonnés aux restaurants spécialisés, et presque introuvables dans le commerce, les produits asiatiques sont plus populaires que jamais. À tel point, d’ailleurs, que plusieurs d’entre eux ont intégré nos recettes quotidiennes. Comment expliquer un tel engouement, et comment s’illustre-t-il dans nos épiceries ?
La cuisine asiatique n’a pas toujours eu la cote au Québec. Même si on pouvait croiser, à compter de 1877, une première vague d’immigrants cantonais à Montréal dans ce qu’on appellerait bientôt le Quartier chinois, l’attrait pour leur cuisine a été nettement plus tardif.
« En 1966, quand je suis arrivé au Québec, on ne proposait essentiellement ici que des plats comme du chow mein ou des egg rolls, qui n’ont rien d’asiatique », raconte Tuan Nguyen Dang, auteur du livre Comme au Viêt Nam, dans lequel se mêlent ses recettes de cuisine et le récit de son parcours dans sa patrie d’adoption.
La situation était encore pire pour les produits, poursuit notre interlocuteur : « On ne trouvait, par exemple, que de la sauce soya VH dans le commerce. Elle était épaisse, sucrée, alors qu’il en existe une grande variété en Asie, de couleur claire ou foncée, adaptées à différentes recettes. Je trouvais cela navrant, en raison de la grande richesse des traditions culinaires asiatiques. »
M. Nguyen Dang a vu la donne tranquillement changer, grâce à l’Expo 67, à l’arrivée des boat people vietnamiens, d’immigrants chinois et hongkongais. Mais la cuisine asiatique n’était pas encore très connue des Québécois quand Lilly Nguyen, autrice des deux tomes de Baguettes et fourchette, a débarqué avec sa famille en 1979.
« À l’école, on me regardait de travers dès que j’apportais des rouleaux de printemps ou un bol de riz pour le lunch », avoue-t-elle. Un manque d’éducation qui s’est comblé au fil du brassage ethnique, de l’arrivée d’Internet et des réseaux sociaux, de la démocratisation des voyages, de la K-pop, de séries télé à succès, etc.
« Maintenant, tous les gens sont familiarisés avec les soupes tonkinoises, les sushis, les bibimbaps, les bánh mì », poursuit Mme Nguyen, qui n’est pas étonnée que les produits asiatiques soient populaires dans les épiceries.
D’ethniques à universels
Coriandre, tofu, nouilles en tous genres, sauce de poisson, sambal oelek, gochujang, huile de sésame, matcha… On ne compte plus les aliments asiatiques qui ont intégré notre quotidien alimentaire. Ils s’affichent depuis longtemps dans des épiceries spécialisées, comme les marchés Kim Phat, mais aussi de manière de plus en plus éloquente dans nos épiceries traditionnelles, surtout si elles sont entourées d’un important bassin de population asiatique.
Mais le succès de ces aliments se mesure encore plus avec l’arrivée au Québec, il y a trois ans, de T&T, de grandes surfaces débordant de produits asiatiques connus ou déstabilisants, comme les 20 variétés de gâteau de riz (aux haricots rouges, au sucre noir, etc.), le plat d’ormeaux aux tendons de crevettes, de pétoncles et de bœuf, ou bien les fruits et les collations surprenants actuellement en vente sur place à l’occasion du Nouvel An lunaire (29 janvier).
« Les clients québécois sont de véritables amateurs de gastronomie. Ils aiment découvrir de nouveaux aliments, connaître leur histoire, savoir comment les préparer, nous apprennent les responsables de T&T. Nous voyons également souvent des clients acheter jusqu’à cinq différents plats cuisinés, notamment du poulet papa ou des sushis frais. »
Tuan Nguyen Dang, qui fréquente lui aussi les épiceries T&T, est formel. Il estime que 70 % de la clientèle qu’il y côtoie n’est pas asiatique. « Les prix y sont compétitifs, et on y déniche des produits introuvables ailleurs, comme des abats, des anguilles, des os à moelle ou des escargots de mer, appréciés des communautés asiatiques, mais aussi méditerranéennes, sud-américaines, moyen-orientales ou africaines », dit-il.
Nos épiceries nationales font effectivement pâle figure en matière de produits asiatiques, comparées à T&T. « Les grandes enseignes n’offrent pas beaucoup de choix, et les marques représentées ne sont pas toujours synonymes de qualité », déclare Lilly Nguyen, qui reconnaît néanmoins que les prêts-à-manger ou à cuisiner de spécialités asiatiques qui prennent du temps à préparer, comme les sushis, les dumplings et les viandes à fondue, ont du succès partout.
« Mais ces produits sont encore ghettoïsés dans une section du magasin, ajoute-t-elle. Alors, j’espère qu’un jour, le vinaigre de riz aura sa place à côté du vinaigre balsamique sur les rayons. » Au regard de la place croissante que ces produits occupent dans notre vie, nous sommes convaincus que ce n’est pas un vœu pieux.
Des ponts gourmands entre l’Asie et l’Occident
Plusieurs événements organisés par les communautés asiatiques contribuent à tisser des liens avec les Québécois de toutes origines. En voici deux exemples importants.
• Nouvel An lunaire : célébré dans de nombreux pays asiatiques, il aura lieu sous le signe du serpent le 29 janvier 2025. Les festivités ont toutefois déjà commencé et se concentreront le 1er février, avec un populaire défilé dans le Quartier chinois de Montréal, de nombreuses activités artistiques, et la possibilité de goûter à des spécialités traditionnelles comme le poon choi, un gros plat rassemblant une dizaine de viandes et fruits de mer cuisinés.
• 50e anniversaire de l’arrivée des Vietnamiens au Canada : le 30 avril prochain marquera les 50 ans de la fin de la guerre du Vietnam et de l’exode de ses citoyens à travers le monde. Pour marquer ce jalon, de nombreuses activités grand public (fête du Têt, expositions, ateliers de cuisine, etc.) seront organisées au cours de l’année 2025. Suivez le groupe Super Boat People pour en savoir plus.
Bonnes adresses
•Supermarchés T&T (deux succursales, à Montréal et à Brossard) : les plus grandes surfaces du genre au Québec.
•Marchés Kim Phat (quatre succursales, à Montréal et à Brossard) : l’enseigne la plus implantée au Québec, à la fois en tant que commerce et comme grossiste.
•Marché Huưng Phát (Montréal) : un marché avec en prime un vaste choix de plats cuisinés vietnamiens excellents, semble-t-il.•Supermarché Xinya (Québec) : ce nouveau grand magasin reflète l’intérêt croissant des habitants de la capitale pour les produits asiatiques.
•La Montagne dorée (Québec) : véritable institution du quartier Saint-Sauveur, cette épicerie créée par des Laotiens existe depuis 1995.
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